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blog/posts/2014/2014-12-14-protectionnisme.md

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Le titre est un peu provocateur bien que je l'ai adouci en remplaçant "nationaliste" par "protectionniste". Le nationalisme m'a toujours fait peur, je l'assimile à l'égoïsme, le repli sur soi, la peur de l'Autre. L'Histoire est jonchée d'horreurs perpétrées en son nom. C'est un peu injuste car la fierté du sentiment d'appartenance à un groupe n'est pas malsaine : supporter un club de sport, faire partie de la communauté des développeurs du langage Blurg ou des gamers du jeu Zygoom, je trouve ça naturel car les gens partagent une passion. Se sentir partie intégrante d'une communauté à l'échelle d'un village je comprends aussi. Au delà, à l'échelle d'une région ou d'un pays je ne suis plus. Qu'est-ce que je partage avec quelqu'un né à l'autre bout de la France ? Est-il plus proche de moi que l'italien à 3h de voiture de chez moi ? Pourquoi ? parce qu'on parle la même langue ? Parce qu'on est circonscrit par les mêmes frontières ?

A une époque où on noue plus de liens en ligne qu'IRL (In Real Life comme disent les jeunes) ces frontières semblent abstraites. Elles délimitent un espace avec des lois communes, soumis à une certaine fiscalité, protégé par des militaires et des policiers qui risquent leur vie (hommage à leur dévouement). Mais qu'est-ce qu'on partage réellement à l'intérieur de cet espace ?

Pendant des années j'aurais dit pas grand chose. Tourné vers le monde extérieur j'ai été engouffré consentant dans la spirale de la Mondialisation avec ses bons côtés : rencontrer des gens d'autres cultures, voyager, travailler avec 3 fuseaux horaires. Et avec ses mauvais côtés : gagner plus sur le dos d'économies plus faibles donc de gens aussi capables que vous mais qui seront payés moins parce qu'un système économique a fixé les règles, travailler pour des sociétés dont le but est d'amasser pour reverser à des actionnaires. A cette époque je me sentais plus citoyen du monde que français.

Tout s'est calmé en 2008 quand une certaine crise a mis certains de nos clients devant les caméras, pointés du doigt à raison comme responsables de l'écroulement d'un système sous respiration artificielle depuis des années. Ma société a rassemblé ses forces, en se repliant, donc en laissant des gens sur le carreau, l'occasion pour moi de préparer un nouveau départ (merci Pôle Emploi j'ai réalisé à cette époque qu'on était bien couvert en France) et de faire un auto-bilan. Je suis reparti avec quelques idées phares : rester dans l'informatique et le logiciel, faire du logiciel plus utile, et renouer avec le Libre et GNU, une passion mise en sommeil 10 ans auparavant.

Quant à la fameuse crise, les gouvernements (donc les citoyens) ont payé la note, les casseurs du système ont fait leur mea culpa (plus jamais ça, moins de dérégulation, nécessité de transparence, plus de contrôle). Six ans plus tard, même en étant optimiste, il est évident que les mauvaises habitudes ont repris, que les lynchés d'hier ont pris du pouvoir, dans la vie politique européenne notamment. D'ailleurs, pour échapper à information atone et sans sous-titre des journaux télévisuels, je vous engage à lire le blog de Paul Jorion => suivez le lapin blanc.

Pour ma part, depuis six ans je me fais plaisir et pas que professionnellement. Les fins de mois sont plus dures, comme pour le français moyen, ce français auquel je m'identifie désormais totalement mais je suis en accord entre ce que je fais et pour qui je le fais.

Pourquoi toute cette tirade et quel rapport entre le Libre et la Mondialisation ?

On critique beaucoup les américains mais leur sentiment national est une force pour protéger leur économie. Ils sont prêts à payer un peu plus cher pour acheter américain. L'initiative Dégooglisons Internet a démarré comme un refus de vendre sa vie privée à des sociétés commerciales. Depuis quelques temps, je lis aussi des volontés individuelles de se passer d'Amazon afin de supporter les petites librairies, même si ça coûte quelques euros de plus. A titre personnel, je me force à limiter mes achats sur Internet et à faire le tour des enseignes locales auparavant pour leur donner leur chance. Je serais peiné que la FNAC disparaisse par exemple. Je privilégie O2Switch et OVH pour mes hébergements et pas seulement par protection de mes données personnelles : je ne veux pas que mon pays devienne un désert.

20 ans en arrière l'open source c'était du code C dans un kernel et il fallait parler finlandais pour y comprendre quelque chose ;-) Aujourd'hui l'open source s'étend progressivemet à d'autres domaines : l'électronique (Arduino, les imprimantes 3D), l'art, l'architecture, l'agriculture (pour se protéger des brevets sur les semences). L'open source sert la contestation et le protectionnisme : pas celui du repli mais celui de la résistance. Quand on regarde les gens qui débarquent sur Framasphere (au passage : fabuleuse idée que celle du tag #nouveauici et #nouvelleici), certains fuient la société de surveillance (Google, Facebook) mais beaucoup affichent aussi de l'intéret pour l'écologie, les AMAP, les médecines alternatives (je n'ai pas parlé du système économique qui a pris le controle de la Santé et règle tout problème de façon médicamenteuse d'ailleurs).

Tous ces sujets se rejoignent et annoncent l'émergence d'une prise de conscience citoyenne mondiale : trouver des solutions localement avec moins d'impact sur l'environnement, préserver, gagner en autonomie et en liberté, répliquer ce qui marche ailleurs. Ca se passe ici mais aussi là bas dans les pays émergents grace à Internet comme vecteur de communication. Et le mouvement Open Source et le Libre ne sont rien de moins que les outils pour résister, se libérer, trouver des alternatives plus propres et moins chères dans de plus en plus de domaine. Le DIY a beaucoup d'avenir et on n'a pas encore pris la mesure de l'impact de l'Internet sur le collectif mondial, de sa capacité à connecter les gens autrement et à propager les bonnes solutions.